Brève mise au point technique
Quelle que soit l'époque considérée, une entité économique possède des biens et
des dettes. En employant une terminologie contemporaine, le commentateur
comptable dit que ces biens et ces dettes composent respectivement l'actif et
le passif de ladite entité. Périodiquement, à partir de son actif et de son
passif, le gestionnaire comptable tire un état exprimé en unités monétaires et
dont l'utilité est à la fois interne et externe à l'entité économique. Dans le
premier cas, le dirigeant dispose des informations nécessaires pour connaître
avec précision la valeur du patrimoine qu'il exploite. Dans le second cas, un
tiers obtient plus d'éléments pour étudier la solvabilité de son interlocuteur
tandis que l'administration fiscale reçoit les informations indispensables pour
calculer l'assiette de ses prélèvements.
Toutefois, ces biens ne
conservent pas indéfiniment une valeur stable et identique à leur coût
d'acquisition. Leur valeur varie en fonction de plusieurs facteurs. Par
exemple, une installation technique ou un matériel perd d'autant plus de valeur
marchande que son utilisation est intense ou qu'un nouveau procédé plus
performant est désormais disponible. Usure et obsolescence diminuent la valeur
monétaire de tout équipement technique, que la terminologie latine fait entrer
dans l'instrumentum d'une exploitation. La constatation comptable de ce
phénomène microéconomique continu et irréversible constitue l'amortissement.
Cette dépréciation n'affecte pas seulement des éléments corporels comme une
machine mais peut aussi toucher des éléments incorporels. [...]
Pour la France contemporaine et à
la lecture du Plan comptable général, l'amortissement pour dépréciation
correspond à la constatation comptable d'une diminution de la valeur d'un
élément d'actif née de l'usage, du temps, d'une modification des techniques ou
de toute autre cause dont les conséquences sont jugées irréversibles. Cet
amoindrissement de la valeur d'un bien est étalé dans le temps en fonction de
sa durée de vie estimée. L'amortissement pour dépréciation d'un élément d'actif
est un double constat : celui de la diminution de la valeur d'un élément
d'actif et celui de l'étalement dans le temps d'une charge . D'un point de vue
comptable, l'amortissement sert à enregistrer une perte subie (notée parmi les
charges) et la variation négative de la valeur d'une immobilisation (une partie
du patrimoine de l'entité économique immobilisée sous forme d'un bien corporel
ou incorporel). Si cette comptabilisation n'a pas lieu, le résultat d'un
exercice est faussé, il ne reflète pas la réalité : ni la valeur réelle des
immobilisations ni toutes les charges d'un exercice sont prises en compte. La
valeur effective d'un patrimoine demeure méconnue au profit d'une image
dénaturée.
[...]
AMORTISSEMENT ET DÉPRÉCIATION
Plusieurs sources médiévales directes contiennent des inventaires de fin d'exercice. Parmi les plus anciennes de ce type se trouvent des documents relatifs à la liquidation d'une compagnie commerciale impliquant Bernardino Ugolini. Cet inventaire qui date de 1280 environ n'est pas un cas unique. Une autre firme, installée à Florence, celle d'Alberto del Giudice, en rédige un tous les deux ans selon une documentation qui débute en 1304 .
A côtés de ces documents, il existe deux familles de registres très connues, il s'agit des livres de Francesco Del Bene et de ceux de Franceso Datini . En ce qui concerne les premiers, Raymond de Roover remarque que dès 1322, une estimation de la valeur intrinsèque de chaque élément du patrimoine est faite lors de chaque inventaire . Cette procédure n'est pas laissée à la fantaisie du commerçant, qui pourrait être tenté de surestimer ses actifs pour donner une meilleure image de sa surface financière et des garanties qu'il serait susceptible de présenter. Des experts sont missionnés en qualité de sapiteurs . Pour le cas de Francesco Del Bene, ils appartiennent à une célèbre compagnie de banquiers, celle des Bardi de Florence . Les livres de comptes de la seconde famille, celle de Francesco Datini, contiennent des principes identiques. A la fin d'un exercice, quand est dressé un inventaire, la valeur mise en face de chaque article est celle qui aurait été obtenue en le vendant au cours du marché à cet instant-là.